La politique présidentielle et gouvernementale navigue depuis deux ans sous l’empire du « trop » de déficit, trop de dettes dans un premier temps, trop de charges, trop de dépenses publiques à présent. A l’augmentation de la pression fiscale succèdent désormais réduction d’impôt, allègement de cotisations. Mais la faiblesse française réside pour bonne part dans le « pas assez » d’investissement, d’innovation, de rémunération du travail.
Le Conseil des Ministres a adopté le projet de loi de finances rectificative pour 2014 et validé les principales mesures rectificatives pour la sécurité sociale. Un « Pacte » national est projeté à horizon 2017, mettant en balance 45 milliards de réductions d’impôts et de charges et 50 milliards d’économies sur les dépenses publiques. Pour l’essentiel la volonté est de « redonner aux entreprises les marges nécessaires pour embaucher, innover et investir » selon le communiqué gouvernemental du 11 juin dernier. S’y ajoute -inflexion récente- « l’allègement de la pression fiscale sur les ménages aux revenus moyens et modestes « parce qu’ils ont pris leur part, depuis 2011, à la réduction du déficit public ». La concertation sociale et le débat parlementaire diront comment cette nouvelle politique traduira l’esprit de responsabilité et de solidarité au bénéfice de la croissance et de l’emploi, pour un gain de compétitivité et un recul de la précarité. Car notre économie pâtit du « pas assez » de dynamique d’avenir.
Nous sommes attentifs aux mesures impactant la Sécurité sociale. La conversion au « trop de charges » vaut aux entreprises, pour 2014, selon la présentation gouvernementale, 4,5 milliards de baisse du coût du travail, 1 milliard d’abattement de la contribution C3S, 1 milliard de réduction des cotisations des travailleurs indépendants et 2,5 milliards de baisse des cotisations salariales s’y ajoutant. Or, la Commission des comptes de la Sécurité sociale, dans son rapport de juin 2014 fait état de « recettes moins dynamiques que prévues » qui devraient, pour l’année en cours être inférieure aux prévisions de près de 2 milliards. Le budget de la Sécurité sociale pâtit déjà de l’atonie de l’activité et du chômage élevé, procéder à des baisses de cotisations ne pourra que l’handicaper lourdement alors que son rôle d’ « amortisseur de crise » est loué par ailleurs. L’engagement de l’Etat à compenser intégralement les pertes de recettes ne nous convainc pas.
Côté dépenses 10 milliards d’économie sont programmés pour l’assurance maladie, à quoi s’ajoute la « non revalorisation de certaines prestations sociales » que le Conseil des Ministres adoptera le 18 juin. Cela augure des mesures abrasives alors qu’une politique de remusculation des solidarités est nécessaire. Ce à quoi tourne le dos le discours « trop de charges, trop de dépenses ».
Jean-Michel LAXALT
Président de l’Institut Montparnasse